Nichole Ouellette
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ESQUISSE GÉNÉRALE DE LA FLORE LAURENTIENNE.
| II. - DYNAMISME DE LA FLORE LAURENTIENNE. |
| A. - LE POINT DE VUE DYNAMIQUE.
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B. ― FACTEURS DYNAMIQUES INTRINSÈQUES.
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Durant les centaines de siècles que la glace entoure les nunataks, cette
évolution se poursuit. Lorsque le glacier bat définitivement en retraite, la
région rabotée par la glace, le bouclier précambrien et la vallée du grand
fleuve Saint-Laurent, sont de nouveau colonisés par une flore sélectionnée
durant l’épreuve glaciaire, flore jeune dans ses associations, conquérante
d’espace, d’un type uniforme, qui trouve son expression schématique dans les
Laurentides. Le trait principal de cette flore est son uniformité et l’absence
d’espèces locales et d’endémiques. Il est clair que, dans le cadre des
conditions postpléistocènes, les quelque 40,000 ans qui se sont écoulés depuis
le retour de la végétation n’ont pas été physiquement suffisants pour permettre
la production d’espèces nouvelles. Cette uniformité est telle, que connaître les
unités systématiques et les associations de cent milles carrés des Laurentides,
c’est connaître complètement toute cette immense région. Uniformité, mais non
pauvreté. Les Laurentides sont un Éden, un Éden boréal et un peu sévère
peut-être, mais où la vie déborde, riche, fraîche, vigoureuse.
Arrêtons-nous ici un instant à imaginer la silencieuse remontée des unités
militantes de la forêt canadienne vers le nord. C’est un grand tableau
biologique déployé sur le mur des temps révolus.
D’abord parurent, sombres et drus, ces rudes pionniers : l’épinette noire et
l’épinette blanche, le sapin baumier et le mélèze, et plus tard, beaucoup plus
tard, la majesté myriadaire des pins. Puis, suivirent les peupliers et les
bouleaux, les aulnes et les viornes, les cornouillers et les airelles. Et l’érable
à sucre prit possession des moraines bien drainées sur les flancs des collines ;
l’érable rouge se fixa sur les alluvions fraîches des vallées, et l’érable
argenté se pencha sur la course des fleuves. Si bien qu’après des siècles et des
siècles, la constitution définitive de la forêt dans ses différents climax fit
de notre pays. une grande masse de verdure continue. Et voici maintenant, sur
les pas des grands arbres, les légions graciles des graminées, la multitude des
carex, les robustes eupatoires, les opulentes verges d’or, et combien de
centaines d’autres plantes, poussées en avant par l’esprit de conquête qui est
l’âme de tout ce qui vit.
Et c’est ainsi que, depuis 40,000 ans, les vieilles espèces des nunataks,
assiégées sur les montagnes, subissent l’assaut des robustes envahisseurs. Mais
la bataille est perdue, bien perdue. Handicapées par certaines déficiences
biologiques encore mal comprises, les vieilles espèces ont déjà cédé presque
tout le terrain. Elles sont toutes devenues très locales, certaines d’entre
elles extraordinairement locales, confinées maintenant sur un seul sommet de
montagne, dans une seule crevasse de rocher, ou dans une seule anse abritée de
quelque île déserte. Seul le botaniste professionnel, prévenu des faits, peut
voir que les nunataks, malgré leur apparente continuité avec le pays qui les
entoure, sont encore de véritables îles physiologiques, des centres où la
tendance endémique s’accuse et où, par contraste avec le reste du pays, nous
pouvons saisir sur le fait le dynamisme qui entraîne l’évolution organique.
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Frère Marie-Victorin (1885-1944)
Flore laurentienne, p. 73, 74.
le vendredi 11 avril 2003 - le mercredi 21 mars 2012
constante mouvance de mes paysages intérieurs
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